Estuaire de la Gironde

Vous êtes ici : Estuaire Gironde / Coups de cœur / Quatre jours sur l'Estuaire / Jour 1

Jour 1 : De Bourg-sur-Gironde à Mortagne-sur Gironde 65 km

De corniches en marais

Peu importe que le vent pousse les nuages avec force, la couleur de l’eau qui tire vers le gris métal n’en est que plus belle dans le port de Bourg. C’est là que commence ce voyage estuarien, à cet endroit où le bec d’Ambès égraine ses dernières silhouettes industrielles. Garonne et Dordogne allient enfin leur flot, un peu plus au nord, à Bayon. Géographiquement baignée par la Dordogne, Bourg se veut «sur Gironde», comme pour assumer son caractère estuarien. Sur le port ou depuis le promontoire de la vieille ville, perchée sur sa colline, le fleuve est omniprésent. En prenant de la hauteur, l’île d’Ambès apparait dans sa totalité. Un peu plus loin se profile l’île verte. Et de l’autre côté Macau, le Médoc. Nous voilà situés.

  • La citadelle de Bourg-sur-Gironde

 

A fleur d’eau

Cette ville escarpée aux escaliers majestueux (500 marches tout de même) recèle de nombreux trésors : sa villa mauresque, son joli lavoir couvert, la halle charmante de la place de la Libération, sa Chartreuse dite Château de la citadelle, offrant un surplomb magnifique et un coin de verdure paisible. On aurait pu s’arrêter à la terrasse avec vue du nouveau bar à vin de la Maison des Côtes de Bourg, mais il est encore tôt pour l’apéro et la route de la Corniche promet de belles vues fleuries sur l’Estuaire, de Gauriac à la Roque de Thau.

Bonheur des randonneurs comme des touristes en voiture, la voie minuscule navigue joliment entre la Gironde, qui affleure devant des jardins éclatants de lauriers, rosiers, palmiers, bananiers, et les falaises calcaires, celles où la région puise la pierre blonde et où se nichent encore des maisons troglodytes. Les premiers carrelets graciles apparaissent. La route quitte le bord de l’eau après la Roque de Thau, où une pause s’impose sur la digue offerte au fleuve.

  • Bourg-sur-Gironde

A Plassac, une petite randonnée offre des vues splendides depuis les balcons viticoles et se termine en bord d’Estuaire sur des prairies qui n’attendent que le pique-nique. En contrebas, les vestiges de la villa gallo-romaine, connue pour la richesse de ses  mosaïques et de ses peintures murales, se visitent. De Blaye, nous ne verrons que la silhouette majestueuse de sa citadelle Vauban, le petit port et son ponton extérieur d’où partent les mini-croisières pour le fameux «verrou Vauban» ou vers les îles. La sirène du bac retentit pour emporter les voyageurs vers Lamarque. Pour l’heure, nous restons rive droite, et filons plus au Nord, laissant derrière nous les derniers vignobles et châteaux du Blayais.

  • Plassac
 

 

La route rectiligne n’est plus bordée que par les marais et chenaux, les tonnes de chasse et les vaches qui paissent. Un horizon verdoyant que rien ne vient troubler. Après une ligne droite sans fin digne d’un paysage de western humide, Terres d’Oiseaux nous accueille pour une dernière halte apaisante devant le spectacle des oiseaux migrateurs (voir ci-dessous). La journée tire sur sa fin au Port des Callonges où le soleil capricieux dessine sur l’eau des trouées lumineuses argentées. L’estuaire semble comme figé dans la lueur du soir.

  • Terre d'oiseaux

 

Scruteurs d’envol à Terres d’Oiseaux

En 2010, ce bout de terre de marais asséchés a été racheté par la commune de Braud-et-Saint-Louis. Plusieurs projets y ont été envisagés (dont une base de jet ski!), mais devant le fort potentiel de passage d’oiseaux migrateurs, laes collectivités onta finalement opté pour Terres d’Oiseaux, un lieu refuge de 120 hectares pour plus de 100 espèces différentes, ouvert au public. Au fil des années et d’un travail précieux, sont réapparus les milieux humides et tout un écosystème associé. En cette fin de journée, le temps est suspendu aux petits bruits des oiseaux, des poules d’eau, des moutons... Notre guide nous mène de postes d’observation en sculptures, de roselières en chenaux.

Si le site s’arpente librement le long de chemins fléchés selon leurs difficultés, le parcourir avec un guide change la focale. On ouvre les yeux sur des détails insoupçonnés : là une orchidée sauvage, au loin des vaches de race devenues rares, dans le ciel des aigrettes garzettes chassant un milan noir venu trop près de leur nid. On ne se lasse pas de réciter les noms de ce peuple des marais, comme une litanie poétique : chevalier aboyeur ou culblanc, vanneaux huppés, foulque macroule, cigognes, héros cendrés, échasses blanches... Ils vont et viennent selon les saisons, nichent, vivent, se posent, repartent. Certains sont fidèles, d’autres, telles l’échasse blanche, beaucoup moins. D’une caisse de bois, notre guide sort tout à coup des pattes d’oiseaux retrouvées sur le site. Ce qui s’observait dans la jumelle, s’étale dans nos mains, pattes jaunes et griffues, longues ou courtes. Passer quelques heures dans cette terre lointaine dévoile de nouveaux secrets de la nature : la femelle tadorne qui s’enterre pour pondre ses oeufs, les hérons cendrés qui ont construit un dortoir dans les pins sans que rien ne les y oblige, le blaireau qui pose de véritables «toilettes» à ciel ouvert au pied des roselières. Dans les prairies humides vaches, poneys, moutons, paissent tranquillement, les grenouilles entament leur chant du soir. Il est l’heure pour les humains de se retirer.